Pour changer un peu du Tichodrome, mais pour rester dans les oiseaux prestigieux, histoire que le niveau de ma production reste toujours au top (ben quoi ?), voici une petite série sur le fantôme des roselières, celui que l’on ne voit jamais, qui vit discrètement, qui se confond avec les roseaux : le Butor étoilé.

Nous sommes un samedi après midi au sud du Lac du Bourget. Le temps est pourri, ciel gris, un vent d’enfer à découper les cornes des bœufs au couteau (c’est bien ça l’expression non ?). Pour passer le temps, je me rends à l’observatoire de Buttet, accessible uniquement par certaines personnes VIP membres de la FRAPNA et de la LPO. L’avantage, c’est qu’on y est bien tranquille. Donc j’arrive, je mets un coup de Zeiss à l’horizon, pas un canard en vue, rien, le désert complet. Pas étonnant vu le vent. Après 10 minutes, je me demande ce que je fais là. Je pense déjà à partir, et voilà que le miracle se produit : un butor se pointe au pied de l’observatoire ! Par contre, le 2ème miracle, celui qui consiste à faire apparaitre par magie mon 7D avec le 500mm devant moi n’arrive pas. Faut dire que le sac photo est resté dans le Pays de Gex. Je n’étais pas sensé faire de la photo ce week-end !

Heureusement, j’ai quand même la longue-vue, elle, je la prend presque tout le temps, c’est un instrument d’observation indispensable. Du coup, je descends discrètement au gabion situé sous l’observatoire, et tout doucement, j’arrive à entrer, à installer le digiscope et à lever une vitre me permettant d’avoir une vue directe sur ce magnifique butor qui se tient à 10 mètres sans bouger. Je m’aperçois vite de ce que je craignais : non seulement le butor est trop près et ne rentre pas entier dans la cadre même en baissant la focale à 1000 mm, le minimum, mais en plus, la lumière est vraiment insuffisante. Je suis obligé de prendre des photos au retardateur, et encore, le vent qui entre par l’ouverture fait vibrer ma longue-vue et rend beaucoup de photos floues. De plus, l’autofocus se laisse souvent berner par tous les roseaux situés sur tous les plan des images. Mais bon, en 1h30, j’enchaine les photos, j’ai presque honte de dire que j’en ai pris 520 ! Le tout avec mes 2 vieilles batteries que je n’avais pas rechargées depuis le mois d’octobre ! Mais fallait bien ça, une fois triées, il en reste une petite trentaine qui soient nettes et intéressantes à la fois…

Au début, le butor reste un peu en retrait dans les roseaux :

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Puis au bout d’un moment, il s’approche lentement du bord pour pêcher. Là, un micro-rayon de soleil surgit, me permettant d’atteindre une vitesse record de 1/200s à 200 iso !

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Mais ça ne dure que quelques secondes.
Comme on ne verra pas beaucoup les pattes de l’oiseau dans les photos qui suivent, je vous mes montre correctement ici :

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L’oiseau reste immobile mais déplace sa tête de temps en temps, un coup à droite, un coup à gauche. Il faut bien viser parfois pour ne pas trop avoir d’obstacles devant la tête, surtout qu’avec le retardateur, il bouge toujours la tête avant que les photos ne soient prises…

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Et quand il se met à pêcher, ben c’est trop rapide…

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Lorsque le Butor pêche, il tend le coup, trempe le bout de son bec dans l’eau et attend. J’en ai quand même une de bonne de ce moment !

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Même si celle-ci aurait été meilleure si la mise au point avait été bonne…

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Bon allez, une petite série de portraits nets :

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Là, il vient d’attraper un petit poisson juste pincé dans le bout du bec. En plus c’est net ! Oui bon c’est vrai, y a comme un petit truc devant l’œil de l’oiseau qui gâche la photo…

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Vous avez vu ? Sur celle-ci il rentre entier, cool !

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Bon, y a toujours 1 ou 2 vieux roseaux devant, mais bon y a pas beaucoup de photos qui y échappent. Des fois y a aussi un vieux déchet en bonus, une vieille cartouche ? bon faut voir le côté positif, ça reste plus discret que la vieille bouteille de Fanta qui flotte pas loin de là.

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Oups, celle-ci est floue, dommage j’aime beaucoup la posture.

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A un moment, mon matériel bouge tellement que je foire tout. Faut dire que mon pied est déployé à fond et qu’il n’est pas stable, vu que mon autre pied, beaucoup plus solide, est réservé au matériel reflex. Alors vous allez me dire, pourquoi n’ais-je pas 2 pieds stables ? Et bien en fait j’en ai 2 maintenant, vu que j’ai décidé de m’offrir un pied en carbone pour le 500mm. J’ai un peu hésité, quand on voit le prix ça fait cher pour gagner 900 g (environ 1 euro par gramme…) Et pourquoi je vous raconte ça ? Et bien parce que le matin même du jour de ces photos, mon nouveau pied est arrivé au relais colis, dans le pays de Gex, à 90km. Du coup je n’ai pas pu le récupérer pour le week-end. A 1 jour près j’aurais eu un trépied bien stable pour le butor. Et dire que ça fait des années que j’hésite à commander un pied en carbone… sans commentaires !
Du coup pour palier au problème, je ramène discrètement une table pour poser mon pied replié dessus. La table étant bancale, je dois régler les pieds, mais après, c’est bien mieux !

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Bon, sur la photo, je fais semblant de prendre une photo, vu que l’appareil n’est plus sur la longue-vue, vu que c’est lui qui me prend en photo…
Et hop, encore une avec l’oiseau entier et son plumage en boule. Bon, une fois de plus, y a un roseau qui gène un peu.

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En fait, là il gène encore plus, vu qu’il aplatit tout le côté de l’oiseau…

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On se débarrasse du roseau de gauche et un autre à droite prend le relai :

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Là il se voit moins mais il est toujours là…

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L’oiseau finit par s’enfoncer dans les roseaux.

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La lumière baisse de plus en plus, il n’y a plus rien à faire. Le butor fait demi-tour et revient ! Mais j’ai même plus envie de le voir. C’est la première fois que je quitte un lieu alors qu’un butor est à 12 mètres de moi !

Moralité : si j’avais eu mon 7D mark2 avec le 500mm, j’aurais tout défoncé (enfin façon de parler…), mais si je ne faisais pas de digiscopie avec ma Zeiss, je n’aurais même pas pu faire la moindre image de ce moment si rare que j’ai espéré pendant de nombreuses années. Donc je ne m’en sors pas si mal !