Approche des oiseaux

En complément de ma page consacrée à mon éthique, voici quelques informations sur les techniques que j’utilise pour approcher les oiseaux. En France, où la chasse est très développée, les animaux sont très craintifs envers l’homme. Il suffit souvent de pointer un oiseau du doigt pour provoquer son envol, et il en va de même lorsqu’on en vise un avec un objectif ou une paire de jumelles. Leur crainte de l’homme est omniprésente. Les oiseaux ont l’oeil vif, ils sont très attentifs à ce qui se passe autour d’eux, même lorsqu’ils chassent, se toilettent ou se reposent. Ils ont une très bonne vue et détectent les moindres mouvements autour d’eux et les moindres formes anormales. On ne pourra jamais se camoufler assez pour s’effacer le leur vue. La meilleure façon de s’approcher des oiseaux est alors de briser la silhouette humaine, afin d’être vu, certes, mais pas forcément comme un humain, juste comme un élément étranger du paysage qui ne représente pas forcément un danger. Ce n’est jamais facile car pour réaliser de belles images, il faut souvent pourvoir se trouver à seulement quelques mètres de son sujet.

L’approche à pied

S’approcher d’un oiseau à pied, même avec un camouflage, est très délicat. Comme la nature est mal faite, plus un oiseau est gros, plus sa distance de fuite est importante. Et c’est dommage, car du coup, on n’arrive jamais à être assez près. De plus, si l’on prend son temps pour s’approcher lentement, il y a de fortes chances pour que l’oiseau décolle bien trop tôt, soit parce que vous l’effrayez déjà, soit parce que comme les oiseaux ont la bougeotte, surtout les passereaux, il va décider de changer de perchoir de lui-même sans que vous y soyez pour quelque-chose !

Je tente rarement l’approche, car on ne fait que déranger l’oiseau sans faire la moindre photo intéressante. Mais parfois, en tombant sur un sujet montrant un comportement anormal, on peut faire des photos inespérées. Il y a aussi des personnes qui, pour une raison mystérieuse, peuvent s’approcher tout près des oiseaux sans les faire partir. Je pourrais citer J-R et Jeannot, mais je préfère ne pas balancer…

Un jour d’hiver où la neige avait surpris tout le monde, je suis tombé, dans une zone de promenade, sur un groupe de bruants de roseaux, qui, certainement en stress alimentaire, se sont montrés indifférents à mon approche. Ce ne fût pas le cas des promeneurs qui passaient à côté de moi en se demandant ce que je faisais à genou dans la neige avec mon trépied…

La voiture

C’est un excellent moyen d’approcher les oiseaux. Ceux-ci sont beaucoup moins craintifs envers un véhicule, même en mouvement, qu’envers un humain. Une buse sur un poteau au bord de la route sera insensible à un véhicule passant, alors qu’elle s’envolera dès qu’un piéton marchant sur cette même route s’approchera à moins de 200 mètres.

Bien entendu, il vaut mieux posséder un véhicule silencieux avec une ligne d’échappement sans trous (pas vraiment comme mon Express), de couleur pas trop flash (avec le temps, la peinture blanche de mon Express est de moins en moins flash, il faut voir le bon côté des choses…), même si les oiseaux ne semblent pas trop sensibles à cela. Il demeure délicat de s’approcher assez d’un oiseau pour faire de belles photos, mais ça fonctionne de temps en temps. A l’intérieur de la voiture, j’appuie en général le téléobjectif sur la vitre de la portière baissée. Il est important de couper le moteur pour éviter les vibrations au moment des prises de vue, même si, des fois, c’est ce qui provoque l’envol des oiseaux… Une fois arrêtée, la voiture est un bon affût très confortable (on peut même allumer la radio pour patienter en musique pendant 2 heures, comme quand on appelle une administration française), et les oiseaux peuvent s’en approcher d’eux même. Par contre, il faut éviter de mettre le chauffage en hiver, car cela provoque des turbulences à la portière quand l’air chaud de dedans rencontre l’air froid de dehors, et ça perturbe fortement la netteté des images obtenues.

Mon meilleur souvenir, c’est cette Huppe fasciée, qui, après une approche à 15 mètres, est venue d’elle-même se toiletter au pied de la voiture, bien trop près pour que je puisse la prendre en photo !

Les observatoires aménagés

Certains observatoires se prêtent bien à la photo, notamment sur les lacs et étangs. Les oiseaux sont forcément habitués à ces structures et peuvent s’en approcher très près, si toutefois il n’y a pas trop de bruit dans l’observatoire, ce qui est rarement le cas, surtout quand un crétin vient y faire un tour avec son chien…

Les observatoires sont intéressants car ils sont souvent le seul point d’accès dans les zones protégées. Une limite cependant de ces structures est qu’elles sont souvent situés en hauteur afin de permettre une vue dégagée. On ne peut alors que prendre des photos en plongée, et une image de héron ou de canard prise en plongée ne vaudra jamais une image prises au ras de l’eau.

Butor étoilé pris depuis un observatoire. Le fait d’être en hauteur était ici un avantage pour photographier cet oiseau qui reste très souvent dans la végétation.

L’affût

La meilleure solution, mais pas la plus facile, est de se trouver devant l’endroit ou l’oiseau va venir se poser pour chanter ou pour chasser. Ceci nécessite de cibler l’oiseau que l’on veut photographier, et de l’observer longuement pour repérer ses habitudes. Ainsi, on remarque que la Gorgebleue vient toujours chanter sur la même branche, que la Pie-grièche utilise toujours les mêmes postes d’affût, que la Mésange qui apporte de la nourriture à ses poussins fait souvent étape aux mêmes endroits avant d’aller dans son nid.

Une fois le bon endroit repéré, il faut, en l’absence de l’oiseau, se positionner et se camoufler comme on peut. Dans l’idéal, il faut monter un vrai affût, et le laisser longtemps sur place pour que les oiseaux s’y habituent. Concrètement, il y a peu d’endroits où l’on peut laisser un affût sans qu’il soit rapidement dégradé ou volé par le premier débile qui passe par là. Personnellement, je me mets par terre, le plus accroupi possible, avec un filet de camouflage par-dessus la tête qui me recouvre ainsi que le matériel. Le but est de briser le plus possible la silhouette humaine. Ensuite, il faut attendre sans bouger, 4 heures s’il le faut. Les oiseaux restent en général assez méfiants mais peuvent quand même s’habituer à notre présence et finir par venir. Il faut alors être réactif, mais éviter de faire des mouvements brusques avec l’objectif. Il arrive très souvent que le moindre mouvement du matériel photo pour cadrer fasse repartir l’oiseau tant espéré illico. C’est très frustrant, mais lorsque l’on arrive à faire la photo espérée (et qu’après vérification elle n’est pas floue), c’est génial. Et quand elle est floue, on insulte son boitier photo, de toute façon, c’est toujours de sa faute !

Cincle plongeur pris en photo lors d’un affût sous mon premier filet de camouflage, créé en taillant moi-même au cutter une simple bâche à 10 euro. Bien que les couleurs ne se fondent pas très bien dans l’environnement, la silhouette de l’homme est brisée et le cincle est venu par curiosité très près de moi quelques instants pour analyser cette nouvelle forme étrange.
Pic mar photographié vers sa loge de reproduction grâce à un affût fixe de fortune constitué d’un abri de randonnée Quechua recouvert d’un filet de camouflage. La pose de cet affût fixe que j’ai laissé plusieurs semaines a été très bien accepté par le couple, alors que ma présence sous un simple filet n’était pas du tout tolérée. Le plus dur était alors de rentrer dans l’affût sans me faire voir des pics. Il fallait observer les allées et venues à distance aux jumelles pour choisir le bon moment. Mon affût n’a pas été volé dans ce bois, par contre il a été arraché par un chasseur un peu plus tard au bord d’une prairie. C’est le risque quand il y a des…. ingénieurs écologues dans le coin…