Le matériel pour digiscoper

Pour pratiquer la digiscopie, il faut se munir d’un appareil photo numérique (APN), d’une longue-vue, d’un adaptateur pour relier les deux, et également d’un trépied, accessoire indispensable à l’utilisation d’une longue-vue. Voici quelques conseils pour bien choisir son matériel:

L’appareil photo numérique:

Au départ, c’était simple. La digiscopie se pratiquait avec un APN compact classique, c’est à dire à petit capteur. Quelques digiscopeurs se sont risqués à remplacer ce compact par un reflex muni d’un objectif de 50mm. Le résultat fonctionne et peut donner de bonnes images, mais je ne peux que déconseiller un tel montage qui s’avère être lourd et laborieux à utiliser. L’emploi d’un reflex rend également la mise au point entièrement manuelle et génère une perte très importante de lumière. Si vous souhaitez utiliser votre reflex avec votre longue vue, il vaut mieux les raccorder directement sans oculaire ni objectif, selon le montage “reflexoscopique” décrit sur la page de présentation de la digiscopie. Mais ce montage reste délicat à utiliser, la mise au point étant entièrement manuelle et la luminosité résultante très faible (F/11). Les APNs bridges, eux, ne fonctionnent pas en digiscopie à cause du vignettage (voir plus bas).

A partir de 2010 – 2011, les constructeurs ont commencé à sortir des APNs dits hybrides, une sorte de mélange entre un compact et un reflex. Certains sont à objectifs interchangeables, certains possèdent un capteur grand comme ceux des reflex, d’autres ont un capteur d’une taille intermédiaire, 1 pouce, micro 4/3… Les constructeurs ne savent plus quoi inventer. Même les compacts se voient maintenant munis de grands capteurs. Ces APNs sont par exemple le Sony DCR-RX100, les Nikon 1, le Leica X2 etc… Leur prix tourne en général entre 600 et 1500 euro, et pas mal d’entre eux s’avèrent être de bons candidats pour la digiscopie. Mais il faut garder à l’esprit que plus le capteur de l’APN est de grande taille, plus il sera capable de fournir des images détaillées, certes, mais plus il y aura de perte de lumière lors d’une utilisation en digiscopie. En effet, avec un grand capteur, la lumière collectée par la longue-vue sera mois concentrée car diffusée sur une plus grande surface. Ce grand capteur nécessitera de monter plus haut en sensibilité iso. Ce n’est donc pas forcément un avantage dans des conditions de lumières délicates. J’aimerai beaucoup tester tous ces appareils avec leurs différentes tailles de capteurs et leur différents objectifs, mais c’est bien sur impossible et je suis pas mal perdu au milieu de tous ces modèles qui se multiplient comme des petits pains.

Aujourd’hui, la digiscopie évolue encore, car ce sont maintenant les smartphones qui sont les plus utilisés !

Pour moi, avant de se décider, il faut se poser la bonne question. Si la digiscopie représente un moyen peu onéreux de côtoyer les grosses focales indispensables à la photographie des oiseaux, alors un smartphone ou un simple APN compact classique (à petit capteur) suffit, avec tout de même une préférence pour le compact, qui fournira de meilleurs images et beaucoup plus de réglages. Le problème est que le smartphone a tué le marché du compact, et on ne trouve plus vraiment de compacts à petits capteurs haut de gamme actuellement. La série du Canon Powershot S95, 100, 110 et 120, à trouver d’occasion, reste une référence.

Si, par contre, on souhaite faire de la vraie belle photo animalière, exploiter tout le potentiel de la digiscopie et rêver de grands tirages qualitatifs sur papier, alors il devient intéressant de se pencher sur ces appareils hybrides plus chers mais plus performants “en théorie”. Moi, je suis un peu entre les deux. J’essaie de faire au mieux avec un simple compact…

Le Canon Powershot S95, que j’utilise depuis 2011

Pour savoir si un APN donné est compatible avec la digiscopie, le mieux est d’aller à la pêche aux infos sur Google. La principale incompatibilité est due au vignettage. La plupart du temps, seuls les APNs ayant un objectif muni d’une lentille de petit diamètre sont utilisables. Si la lentille a un trop gros diamètre, il y aura beaucoup de vignettage sur les images prises à travers la longue-vue. Ce que l’on appelle “vignettage” en digiscopie, c’est le fait d’avoir un gros rond noir qui occupe une grande partie de la photo, laissant peu de place à l’image. Avec un APN à petit diamètre d’objectif, on peut en général supprimer ce rond noir en zoomant un coup avec la longue-vue ou l’APN. Avec un APN ayant une lentille de gros diamètre, ce rond noir est en général impossible à éliminer. C’est une règle générale, mais il y a des exceptions et pour être sur, le mieux est tout simplement d’essayer en positionnant l’APN devant la longue-vue. Certains APNs vont fonctionner avec une longue-vue et pas avec une autre…

La Longue-vue:

Quel que soit l’APN, pour obtenir des photos de très bonne qualité, il faut impérativement utiliser une longue vue haut de gamme, bénéficiant d’un traitement apochromatique et d’une lentille d’entrée de grand diamètre pour avoir beaucoup de lumière. Les meilleures longues vues pour digiscoper sont les Swarovski ATX et ATS 80 HD, la Leica Apo-Televid 82, la Zeiss Diascope victory 85 TFL (et la très récente Victory Harpia) ainsi que la Kowa TSN 883. D’autres bonnes longues-vues existent, par exemple chez Nikon, Opticron, Kite, Olivon. Mais leur qualité reste inférieure aux 4 premières citées, même si des modèles récents sont peut-être aussi bons. Il faudrait des tests comparatifs de digiscopie pour le savoir, ce qui n’a jamais été fait.

La Zeiss Victory Harpia, une nouvelle référence  dans le monde de l’observation de la nature

Au niveau des oculaires, on obtient de bons résultats avec un zoom ou un oculaire fixe (grossissant en général 30x). Si vous optez pour une longue-vue haut de gamme, les zooms ont fait tellement de progrès qu’ils sont à privilégier. Il n’existe d’ailleurs souvent plus d’oculaire fixe pour ces modèles. Si vous optez pour une longue-vue moyen de gamme, il faut privilégier un oculaire fixe qui offrira une meilleure image, un meilleur champ de vision et donc moins de vignettage. Même en observation, un oculaire fixe sera plus confortable à utiliser.

L’adaptateur:

Après quelques années durant lesquelles la digiscopie s’est bien développée, la mode est un peu en train de passer, et il existe de moins en moins d’adaptateurs proposés par les fabricants de longues-vues pour les APN. Pour les Smartphones, par contre, on trouve à peu près ce qu’il faut. Ce sont des adaptateurs que je connais peu, mais qui sont simples et en général bien faits.

Pour relier un APN à une longue-vue, Il existe 2 types d’adaptateurs. Le premier type utilise le filetage que possèdent certains APNs autour de l’ojjectif. Il en résulte une sorte de cylindre reliant l’APN et l’oculaire de la longue-vue. C’est un très bon système, car il a l’avantage de ne nécessiter aucun centrage de l’APN, qui est d’office parfaitement aligné avec la longue-vue. C’est par exemple l’adaptateur Leica qui permet de raccorder ses propres APNs à sa propre longue-vue.

Le deuxième type concerne les adaptateurs qui utilisent le pas de vis des APNs destiné initialement à la fixation sur un trépied. Ces adaptateurs sont plus ou moins universels, sensés être compatibles avec tous les APNs pour une longue-vue donnée ou même pour plusieurs longues-vues. Ils peuvent être pratiques, mais nécessitent pas mal de réglages pour bien centrer l’APN devant l’oculaire. Souvent, ces réglages de centrage doivent être effectués après chaque changement de batterie, car le capot de la batterie s’ouvre toujours par dessous, donc il faut enlever l’APN de sa plateforme à chaque fois. Un bon adaptateur sera léger, rigide et n’aura pas de jeu dans ses différents axes de réglage. Sinon, les différents jeux ou la souplesse de l’adaptateur suffiront amplement pour dérégler le centrage de l’APN, qui se fait pratiquement au millimètre. Cet adaptateur doit pouvoir basculer sur le côté ou être retiré et remis rapidement, de façon a pouvoir passer de la photo à l’observation rapidement (je rappelle qu’allier observation et photographie est le principe même de la digiscopie!). On peut citer l’adaptateur DCB II de Swarovski, le TSN-DA4 de Kowa, et le Quick camera de Zeiss. Ce ne sont que quelques exemples de bons adaptateurs des grandes marques, en général très chers, mais il en existe une multitude dans toutes les gammes de prix, plus ou moins bien conçus.

Adaptateur universel Quick Camera proposé par Zeiss.
Adaptateur Zeiss pour smartphones.
Adaptateur universel Swarovski DCB II.
Exemple d’adaptateur pas cher compatible avec la plupart des APNs et des longues-vues. Ce genre d’adaptateur reste en général difficile à régler et manque souvent de rigidité.

Le trépied:

Le trépied doit être le plus stable possible, afin de pouvoir faire des observations confortables dans sa longue-vue, et d’éviter, en photo, d’avoir des photos floues à cause du bougé. Manfrotto reste une très bonne marque proposant de bons trépieds pour des prix raisonnables. Un trépied en aluminium est suffisant. Le carbone permet de gagner quelques centaines de grammes, mais pour un prix bien plus élevé. La rotule doit également être rigide et de qualité, afin de permettre des mouvements fluides et un réglage fin de la friction. Pour moi la qualité de la rotule passe presque avant celle du trépied. Une rotule vidéo avec un plateau coulissant est un bon choix. En plus d’être fluide dans le mouvement, le plateau coulissant d’avant en arrière permet de modifier la position d’équilibre de la longue-vue qui varie suivant que le montage digiscopique est accroché ou pas sur l’oculaire. Ceci empêche la longue vue de basculer lamentablement en avant ou en arrière dès qu’on la lâche, chose qui arrive souvent !

Un exemple de rotule vidéo possédant un plateau coulissant d’avant en arrière. Une telle rotule est bien plus agréable à utiliser que la classique “128RC”, la plus utilisée en ornithologie. Elle sera néanmoins un peu plus chère.